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Courir longtemps, c’est l’un des piliers de l’entraînement en endurance. Tous les coureurs le savent : la sortie longue est une séance incontournable pour progresser, gagner en résistance et préparer efficacement une course. Mais faut-il se limiter à une seule séance hebdomadaire, ou enchaîner deux sorties longues par semaine peut-il être un atout supplémentaire ?
L’idée peut séduire : plus de kilomètres, plus d’habitude à courir sur la fatigue, un meilleur entraînement pour le jour J… Mais derrière cette logique apparente se cachent aussi des questions essentielles. Le corps peut-il réellement encaisser une telle charge sans risque ? Cette approche est-elle adaptée à tous les profils ? Est-ce un raccourci vers de meilleures performances ou une porte ouverte aux blessures ?
Comme souvent en course à pied, la réponse n’est pas si simple. Si certains coureurs tirent des bénéfices à allonger toutes leurs sorties, d’autres se brûlent les ailes en tentant d’en faire trop. Alors, deux sorties longues par semaine : bonne ou mauvaise idée ? C’est ce que nous allons explorer dans cet article, en analysant les avantages théoriques, les risques et les alternatives à envisager pour progresser intelligemment. On préfère néanmoins vous le dire tout de suite : sur le papier, ce n’est pas l’idée du siècle et ce n’est pas pour rien qu’aucun plan d’entraînement vous le propose !
Quels sont les bénéfices d’une sortie longue ?
Avant de s’interroger sur le nombre pertinent de sortie longue à effectuer au cours de sa préparation, il est nécessaire de comprendre le rôle de cette dernière dans votre entraînement. Rappelons donc quelques basiques sur l’utilité de cette sortie.
Développement de l’endurance aérobique
L’un des principaux objectifs de la sortie longue est d’améliorer l’endurance et votre durabilité. Courir à une intensité modérée pendant une période prolongée habitue le corps à utiliser efficacement l’oxygène pour produire de l’énergie. Cela favorise notamment le développement du réseau capillaire, l’augmentation du volume sanguin et une meilleure oxygénation des muscles. Plus le coureur est capable d’entretenir un effort en mobilisant majoritairement ses filières aérobies, plus il gagne en efficacité sur les longues distances. Cela permet également à votre corps de s’habituer aux efforts longs qui sont spécifiques et ainsi travailler votre durabilité, un des grands facteurs de performance sur marathon et semi-marathon. C’est le manque de durabilité qui explique la différence de performance entre certains coureurs très bons sur 5km ou 10km mais qui ne parviennent pas à produire des temps jugés équivalents sur des distances plus longues.
Optimisation de l’utilisation des réserves énergétiques
Lors d’un effort prolongé, l’organisme puise son énergie dans différentes sources : d’abord les glucides (glycogène musculaire et hépatique), puis progressivement les lipides. Une sortie longue bien menée entraîne le corps à mieux mobiliser les graisses comme source d’énergie, retardant ainsi l’épuisement des réserves en glycogène. Ce phénomène, appelé « entraînement à l’oxydation des graisses », est particulièrement bénéfique pour les marathoniens et ultra-traileurs qui doivent gérer leur effort sur plusieurs heures.
Cela vous permet également de mieux utiliser les glucides à l’effort lorsque vous optez pour un ravitaillement en cours de sortie, avec des gels par exemple. Nous l’évoquerons durant le dernier point de cette partie mais l’entraînement à la nutrition est nécessaire et la sortie longue est une occasion parfaite.
Renforcement musculaire et articulaire
Les sorties longues ne sollicitent pas uniquement le système cardiovasculaire. Elles constituent aussi un excellent moyen de renforcer les muscles, les tendons et les articulations. Plus on court longtemps, plus le corps s’adapte aux chocs répétés et aux contraintes mécaniques imposées par la course à pied. Cette adaptation progressive contribue à réduire le risque de blessures et à améliorer la résistance à la fatigue musculaire.
Si le mur du marathon se présente souvent pour des raisons énergétiques en raison de coureurs qui ne prennent pas assez de glucide à l’effort, il arrive aussi régulièrement que la barrière soit musculaire. Pour ça, en plus du renforcement il n’y a pas de secret : s’exposer à des sorties longues est un excellent entraînement pour vos muscles.
Apprentissage de la gestion de l’effort et du mental
Une course ne se joue pas uniquement sur la condition physique : la gestion mentale et la capacité à maintenir un effort prolongé sont tout aussi déterminantes. La sortie longue est l’occasion idéale pour apprendre à écouter son corps, ajuster son allure et tester différentes stratégies de course. Elle permet également d’apprivoiser la fatigue, de développer la patience et de mieux gérer les moments difficiles, ce qui s’avère crucial lors d’une épreuve longue distance.
Test du matériel et de la nutrition
Enfin, la sortie longue est le moment parfait pour expérimenter différents aspects pratiques en vue d’une compétition. Elle permet de tester ses chaussures, ses vêtements, mais aussi son ravitaillement : gels énergétiques, boissons isotoniques, barres… Trouver ce qui fonctionne le mieux pour soi aide à éviter les mauvaises surprises le jour de la course.
Théoriquement, quels bénéfices à effectuer deux sorties longues par semaine ?
Maintenant que vous avez en tête tous les merveilleux bénéfices d’une sortie longue, vous avez peut-être tendance à vous dire : deux fois plus de sorties, deux fois plus de bénéfices ! Alors ce n’est pas si simple, le but de cet article est de vous le démontrer, mais il ne s’agit pas non plus de balayer d’un revers de la main tous les potentiels bénéfices que cela pourrait vous apporter.
Un volume d’entraînement accru pour une meilleure adaptation
Multiplier les sorties longues permet d’augmenter significativement le volume hebdomadaire de course. Or, un volume d’entraînement plus élevé est souvent corrélé avec une amélioration des performances, à condition d’être bien assimilé. En courant deux sorties longues au cours de votre semaine, le corps est davantage exposé aux stimuli d’endurance et s’adapte progressivement à des efforts prolongés. Cette charge supplémentaire peut être bénéfique pour ceux qui préparent des courses de très longue durée, comme des marathons ou des ultras.
Un entraînement à la fatigue pour simuler l’effort d’une course
L’un des objectifs de la sortie longue est d’habituer le corps et l’esprit à gérer la fatigue sur la durée. En accumulant deux séances longues dans la semaine, le coureur se place dans une situation proche de celle d’une compétition exigeante, notamment pour les courses où la gestion de l’effort et la résistance à la fatigue sont cruciales. Il apprend ainsi à courir sur des jambes fatiguées, ce qui renforce son endurance musculaire et mentale.
Un atout pour les coureurs d’ultra-distance
Les adeptes des ultra-trails ou des courses dépassant le marathon doivent préparer leur corps à enchaîner de longues heures d’effort. Dans cette optique, deux sorties longues hebdomadaires peuvent être un outil pertinent pour simuler la répétition d’efforts prolongés et tester différentes stratégies de gestion du rythme, de l’alimentation et du matériel.
Dans les faits, pourquoi c’est risqué et déconseillé
Si la théorie est intéressante, dans les faits, accumuler deux sorties longues par semaine l’est nettement moins et nous avons même tendance à vous le déconseiller. C’est la dure confrontation entre les bénéfices sur le papier et le réel. Concrètement, voilà à quoi vous vous exposez en prenant cette habitude.
Un risque accru de surentraînement
Une sortie longue est une séance exigeante, sollicitant intensément le système cardiovasculaire, les muscles et les articulations. En doubler la fréquence signifie augmenter drastiquement la charge d’entraînement, ce qui peut rapidement mener à un état de surentraînement. Ce dernier se traduit par une fatigue persistante, une baisse de performance, des troubles du sommeil et une récupération de plus en plus difficile. À long terme, il peut même provoquer un épuisement général, nécessitant un arrêt forcé de la pratique sportive.
Une récupération insuffisante
Le corps a besoin de temps pour assimiler l’effort et se reconstruire après une sortie longue. L’accumulation de fatigue musculaire et nerveuse demande plusieurs jours de récupération active pour éviter un affaiblissement progressif. En enchaînant deux sorties longues par semaine, l’organisme est mis sous pression en permanence, ce qui empêche une régénération optimale. Résultat : au lieu de progresser, on stagne, voire on régresse. C’est quand même bête d’en faire plus pour risquer d’obtenir moins…
La porte ouverte aux blessures
Courir longtemps signifie multiplier les impacts au sol, sollicitant les articulations, les tendons et les muscles de manière répétitive. Une charge excessive sans récupération suffisante favorise l’apparition de blessures de surmenage comme les tendinites, les fractures de fatigue ou les inflammations articulaires. Plutôt que de gagner en endurance, on risque surtout une interruption prolongée de l’entraînement.
Une baisse de la qualité des autres séances
L’entraînement ne repose pas uniquement sur la sortie longue : la vitesse, l’endurance active et le renforcement musculaire sont tout aussi importants. Si deux séances longues sont placées dans la semaine, l’énergie disponible pour les autres entraînements diminue considérablement. On se retrouve alors à enchaîner des séances de mauvaise qualité, réalisées en état de fatigue, sans réel bénéfice.
Quelles alternatives aux double sorties longues ?
Si vous êtes tombé sur cet article, c’est probablement car vous souhaitez augmenter votre endurance pour développer votre durabilité. Vous êtes peut-être préoccupé par votre préparation marathon qui ne vous en propose pas assez. Pas de panique : nous allons vous proposer des solutions pour améliorer encore un peu plus votre durabilité qu’avec une simple sortie longue par semaine. Si en réaliser deux est une mauvaise idée, voici quelques alternatives qui seront plus intéressantes.
Varier les intensités au sein de la sortie longue
Plutôt que d’accumuler deux longues séances, il est plus intéressant d’optimiser celle que l’on réalise déjà. Une sortie longue ne doit pas forcément être courue à allure uniforme et lente. On peut y intégrer des variations d’intensité pour maximiser ses bénéfices, par exemple :
- Les sorties longues progressives : débuter lentement puis accélérer progressivement sur la fin pour habituer le corps à courir plus vite en état de fatigue.
- L’allure spécifique : inclure des segments à l’allure cible de la compétition (par exemple, 3 x 15 minutes à allure marathon) pour renforcer les adaptations physiologiques.
- Le fartlek : insérer des changements de rythme pour casser la monotonie et solliciter différentes filières énergétiques.
Ces stratégies permettent de stimuler l’endurance sans nécessairement allonger la durée de l’effort.
Doubler certaines journées d’entraînement
Plutôt que de faire deux sorties longues séparées dans la semaine, une autre approche consiste à courir deux fois dans la même journée. Par exemple :
- Une première séance matinale courte et dynamique (footing léger ou travail de vitesse).
- Une seconde séance plus longue en fin de journée, pour cumuler de la fatigue et simuler un effort prolongé sans subir l’impact d’une sortie unique trop éprouvante.
Cette méthode est particulièrement utilisée en ultra-trail pour habituer le corps à courir avec des réserves énergétiques déjà entamées. Si ce n’est pas aussi bénéfique qu’une sortie unique pour l’entraînement de la durabilité, cela reste efficace et se trouve être bien moins risqué côté blessures. Le jeu en vaut donc la chandelle.
Faire votre sortie longue sur une base de fatigue
La sortie longue a pour but d’améliorer notamment votre capacité musculaire à encaisser des efforts longs, à travailler sur fatigue. Un bon moyen de maximiser l’efficacité de cette sortie longue est de la débuter en étant déjà fatigué musculairement. Dans les faits, cela peut se faire de plusieurs manières possibles.
- Placer votre sortie longue le lendemain d’une course à pied exigeante, le critère d’exigence variera selon les profils mais cela peut-être après une petite séance de côtes, une séance avec des intervalles à intensité modérée ou simplement un footing plus long que la moyenne.
- Réaliser une séance de musculation ou de vélo avant la sortie longue, pour fatiguer vos jambes avant votre départ en sortie et ainsi simuler pour vos muscles une course qui aurait déjà débutée depuis un long moment.
Evidemment, ces méthodes sont à employer de façon précautionneuse avec une grande progressivité.
Augmenter légèrement le volume hebdomadaire de manière équilibrée
Plutôt que de concentrer les kilomètres sur deux sorties longues, on peut répartir l’augmentation du volume sur plusieurs séances. Ajouter 10 à 15 minutes à certaines sorties, prolonger l’échauffement ou le retour au calme, ou encore intégrer un footing supplémentaire dans la semaine permet d’accroître progressivement l’endurance sans surcharge brutale.
